Historique
de l'ordre infirmier
La
profession infirmière regroupe 500 000 personnes en exercice,
présentes dans les trois fonctions publiques, dans le secteur
privé associatif et commercial, en exercice libéral,
ou même en entreprise. Leurs domaines d'interventions sont
très distincts et divers : soins généraux,
bloc opératoire, réanimation, psychiatrie, pénitentiaire,
médico-social, médecine du travail, médecine
scolaire, SNCF, entreprise, fonction cadre... Cette profession
est soumise à des compétences strictement règlementées
et à un code de déontologie.
Le
projet d'un ordre infirmier français date d'une trentaine
d'années, et s'inspire de celui des infirmières
québécoises qui existe depuis le 1er février
1974. Il a été porté par de nombreuses associations
certes, mais pour la plupart aussi groupusculaires (on dénombrait
plus de 174 associations à vocations diverses dans les
années 90 !). Certaines s'organisent et réfléchissent
sur la création d'une structure ordinale qui serait, pour
elles, un véritable organe de régulation pour fédérer
ses membres et avoir un interlocuteur unique pour négocier,
discuter et faire des propositions aux Tutelles et au Ministère.
Une
tentative avait eu lieu en juin 2000, sous la forme d'un Office
des professions paramédicales, qui regroupait les infirmières,
les kinés, les orthoptistes et les orthophonistes. (En
1998 seuls étaient concernés les libéraux.)
Mais
devant les difficultés pour donner une seule structure
à cette diversité de professions, l'idée
fut abandonnée.
L'avant
dernière tentative fut un projet de loi, en 2005, porté
par le député Jean-Luc PREEL, elle ne trouvera pas
d'accueil favorable car le projet est trouvé lourd et bureaucratique.
C’est
après cet échec que deux groupes, l' « APOIIF
» (Association Pour l'Ordre des Infirmiers et Infirmières
de France) et le « Groupe Saint Anne » (réunion
de 46 associations et syndicats infirmiers), émergent et
font pression sur le gouvernement pour relancer la création
d'un ordre infirmier avec force lobbyings. Ces deux associations
étaient constitués principalement de cadre et d'infirmières
retraitées !
En
2006 des négociations s'en gagent entre le Ministère,
les organisations syndicales (contre les ordres) et les associations
(certaines pour, d'autres contre les ordres) pour trouver une
solution, le mouvement anti-ordre ayant déjà vu
le jour (pétitions, manifs..).
Dans
la foulée deux élus UMP (Richard MALLIE et Maryvonne
BRIOT) profitent des vacances estivales pour présenter
un texte portant création d'un ordre national des infirmières
aux députés et sénateurs. Ce texte sera voté
le 21 décembre 2006 et les décrets d'applications
seront publiés au Journal Officiel le 13 avril 2007.
Le
ministère aura tranché, le conseil supérieur
des professions paramédicales sera supprimé et une
partie de ses missions seront transférées au Haut
Conseil des Professions Paramédicales, quand à l'ordre
il récupèrera des DASS la gestion des fichiers,
la main mise sur l'autorisation d'exercice et la création
d'un nouveau pouvoir disciplinaire.
Le
24 avril 2008 sont organisées les élections des
conseillers des ordres départementaux auxquelles ne participeront
que 13 % de la profession, toutes catégories confondues.
Le 25 juillet 2008 ce fut l'élection des conseillers régionaux
et enfin le 25 novembre les conseillers nationaux qui élirent
en leur sein Mme LEBOEUF comme présidente.
Aux ordres les kinés ?
En
octobre 2006, quand les kinésithérapeutes et les
pédicures podologues ont reçu leur dossier d'inscription,
avec un montant de cotisation conséquent (200 euros la
première année) la réalité de l'Ordre
leur est apparue.
L'élection
aux conseils de l'ordre avait eu lieu dans une relative indifférence
et le rejet de la structure n'était pas si évident
pour les salariés. Le rejet était sur le montant
de la cotisation .
Le
rapport entre salariés et libéraux étant
à l'inverse de celui des IDE, les kinésithérapeutes
pensaient que les libéraux réclamaient cet ordre
qui allait fédérer la profession !
A
la première Assemblée Générale à
l'AP-HP, il y eu beaucoup de questionnements concernant l'Ordre,
son utilité. Il a fallu expliquer au fil de la mobilisation
les dangers d'une structure anti-démocratique sensée
parler au nom de tous.
Les
menaces de l'Ordre kiné mais aussi pédicures podologues
ont favorisé la prise de conscience des salariés
: cet Ordre n'était pas là pour les défendre
! De là le rejet est devenu total .
Nous
avons dans un premier temps interpellé les différentes
directions, puis le ministères, en vain. La loi est la
loi dixit le ministère.
Il
fallait trouver une action susceptible de gêner le ministère
dans la durée. La grève au regard des effectifs
présents n'aurait servi à rien, tout le monde était
assigné.
L'idée
de refuser d'encadrer les stagiaires a surgit lors d'une assemblée
générale et a suscité beaucoup de réticences
dans un premier temps. Petit à petit, devant le silence
du ministère les kinésithérapeutes en sont
venus à considérer qu'il fallait frapper fort.
En
Janvier 2008, les kinésithérapeutes ont refusé
d'encadrer les stagiaires dans la plupart des établissements
de l'AP-HP et peu à peu ce mouvement a essaimé dans
certaines régions.
Une
manifestation nationale eu lieu en Mars 2008, qui malgré
la pluie battante fut un succès.
Dès
lors le ministère a commencé à bouger et
a organisé « une médiation » sans résultat.
L'ambiguïté
des autres organisations syndicales au niveau national, le peu
de relais dans les régions et la non-prise en compte des
libéraux refusant l'ordre ont favorisé la création
d'un syndicat corporatiste opposé à l'Ordre : Alysé
.
Cette
jeune structure a été en mesure de diffuser au niveau
national tant en direction des salariés que des libéraux
avec les organisations syndicales. Elle a accompagné les
salariés mis en cause au niveau des tribunaux.
La
lutte a permis de clarifier la position des autres organisations
syndicales vis-à-vis des ordres, puisqu'au moins dans le
discours, elles affichent toutes désormais leur opposition
à l'Ordre, ce qui n'était pas le cas au départ
envers les kinésithérapeutes. Les kinésithérapeutes
et les pédicures podologues résistent depuis 3 ans,
attendant que le gros bataillon des infirmières vienne
renforcer la lutte.
Aujourd'hui,
il s'agit de fédérer l'ensemble des professionnels
opposés aux ordres et de trouver des actions communes inscrites
dans la durée.
DIFFÉRENT
(février 2010)
Le journal de la Fédération SUD Santé
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