1996
Et les psy aussi !
Le DEI : une bataille contre les tabous sociaux



        La mobilisation des infirmiers de Secteur Psychiatrique pour obtenir l'équivalence au DEI a duré six ans, pendant lesquels toute une profession s'est soudée, a imposé aux pouvoirs publics et à tous les syndicats sa victoire en 1994, et son refus d'être bradée au nom de la productivité et d'une ségrégation par trop banalisée.

        La réforme des études infirmières en 1992, avec l'unification des filières psy et soins généraux, n'avait pas permis l'émergence de la lutte que nous souhaitions, à l'époque, pour empêcher l'uniformisation déqualifiante de la profession. Il aura fallu la mise en place de mesures discriminatoires à l'encontre des ISP (trois mois de stages humiliants afin d'obtenir l'équivalence au nouveau diplôme), pour qu'elle se soulève dans un élan identitaire fort, et se batte, mémoire en tête, contre l'exclusion et le mépris affiché du champ de la folie.

        La nature de cette lutte est liée à son histoire. Inspirant à priori la défiance pour ce « monde à part », les ISP ont mené seuls ce combat. Aucune organisation ne les a soutenus. Elles ont au contraire torpillé autant que faire se peut leur démarche et leur victoire, jusqu'à extinction. Le même acharnement aurait dû servir la revendication. Et l'histoire n'aurait pas renouvelé le constat des causes perdues parce que trahies pour des enjeux sordides.
        SUD-CRC a été seule à soutenir la profession et l'outil dont elle s'est dotée : le Collectif National de Mobilisation en Psychiatrie. Une expérience notable puisque, sur la durée, il aura fallu autant d'énergie à fédérer qu'à maintenir l'unité du mouvement, contre les vélléités de toute puissance inhérentes aux modes d'organisation collective. Nous avons pris, à tous égards, nos responsabilités dans cette lutte, de l'étayage des revendications à la gestion souvent difficile de la mobilisation. Nous y avons aussi gagné de nombreuses sympathies qui se retrouvent au fil des luttes et de notre développement. C'est là que s'est véritablement constitué ce secteur dans la fédération, avec la contribution assidue des camarades de province à la commission psy, qui consolide et enrichit une cohésion indéniable dans nos orientations et notre pratique.


Naissance de SUD Santé sociaux 31

        Depuis longtemps les sujets de désaccords, couvaient entre le syndicat départemental et la Fédération CFDT : centralisme très hiérachisé, modalités de vote non démocratiques, choix politiques trahissant une collaboration plus ou moins discrète avec le gouvernement et le patronat, tel était le climat dans lequel se sont faits entendre les premiers grondements de protestation.  
        Les divergences au niveau des luttes et la cassure sur les orientations politiques se sont manifestées à travers une action contre deux licenciements abusifs au « NARIDEL » pour laquelles la fédération a manifesté une opposition irritée. Ensuite, ses choix politiques lors des événements de décembre 1995 ont encore élargi le fossé, et durci les positions de part et d'autre.  
        L'interpro et l'ouverture vers d'autres associations ont suscité un nouvel élan de mobilisation : « Tous Ensemble » est né dans l'enthousiasme. L'embryon a grossi jusqu'à la dissidence après le refus d'un congrès exceptionnel pour débattre des questions de fond. Jusqu'au bout, nous avons utilisé la voie démocratique pour tenter d'infléchir les orientations de la CFDT qui n'a pas hésité à utiliser des moyens malhonnêtes pour s'imposer : comment aurait-elle pu répondre de ses agissements et défendre les raisons de son choix inavouable ? Dès lors, le débat s'est engagé dans le syndicat et toutes les sections syndicales pour envisager l'avenir : rester ou partir collectivement (désafiliation de la CFDT). Massivement les syndiqués se sont déterminés pour SUD.  
        Enfin, il nous a fallu prendre le temps de construire notre syndicat, tant sur le plan matériel que logistique et humain, et trouver notre identité, avant de décider de nous affilier au CRC, peu connu des adhérents.  
        Témoignage du CRC de la SOMME 

OFF. Synd. : Pourquoi avez-vous décidé en 1996 de créer un syndicat, et pourquoi un syndicat CRC ?  

CRC 80 : Dans l'établissement, nous avions créé un « Collectif de mobilisation en psychiatrie ». Devant le refus de la direction de nous recevoir (« un collectif n'est pas  représentatif du personnel »), nous avons décidé de créer une section syndicale CRC. Le CRC était le seul syndicat à soutenir la revendications des infirmiers de secteurs psychiatrique. Pour certains militants, le mouvement social de novembre / décembre 1995 a été déterminant dans le choix d'une syndicalisation à CRC (proche de SUD). Dans la section pratiquement, tous les militants n'avaient aucune pratique syndicale avant la création de la section en mai 1996.



OFFENSIVE SYNDICALE (Numéro spécial de décembre 1999)
Bulletin de la fédération National SUD-CRC