On
n'avait pas vu depuis 1968, un mouvement d'une telle ampleur,
même si le secteur privé est resté en retrait.
Amorcée par une manifestation de la Fonction publique le
10 octobre, sur la question des retraites et le gel des salaires,
relayée par celle sur les droits des femmes, le 25 novembre,
la grève démarre en force à partir de celle
des cheminots.
Les
cheminots seront tout au long le moteur de cette lutte. Tous les
secteurs de la Fonction publique et du secteur nationalisé
sont touchés. La forte combativité exprime bien
l'état d'esprit dominant dans le salariat : un rejet de
« ceux d'en-bas » de continuer à subir la dégradation
de leurs conditions de vie et de travail. Malgré l'absence
quasi total de transports en commun, entraînant des grandes
difficultés pour se déplacer, le mouvement est populaire.
La vieille recette opposant salariés du privé à
ceux de la Fonction publique et secteur nationalisé, n'a
pas marché.
Dans
notre secteur, les hospitaliers s'engagent eux aussi dans la grève,
moins peut être que dans d'autres secteurs, mais les cortèges
dans les manifestations sont impressionnants. Quant aux salariés
du social, et particulièrement les travailleurs sociaux,
le mouvement fait l'effet d'un électrochoc. Alors que depuis
le CREM en 1988, il était difficile de les mobiliser, ils
se lancent dans la grève, constituent des collectifs de
travailleurs sociaux qui perdureront après l'arrêt
de la grève, et surtout se syndiquent en particulier à
SUD-CRC.
Face
à cette déferlante JUPPÉ recule, mais pas
complétement. Il maintient le noyau dur de son plan pour
la Sécurité sociale qui vise à l'étatiser
et qui prévoit une nouvelle réforme hospitalière
avec la mise en place des superpréfets sanitaires : les
directeurs des agences régionales de l'hospitalisation.
Ils auront tout pouvoir pour restructurer les établissements
hospitaliers.
Mais
un des aspect les plus marquants de ce mouvement (en dehors de
son aspect massif et radical) est le soutien de la direction confédérale
CFDT au plan JUPPÉ et son opposition à la grève.
Sa position ouvre une crise sans précédent dans
la CFDT, avec des sorties importantes et des créations
de syndicats SUD dans divers secteurs, en particulier chez les
cheminots avec SUD Rail. Mais parallèlement, elle enclenche
une turbulence interne avec l'émergence en son sein d'un
courant qui devient publilc « Tous ensemble » qui
exige un congrès extraordinaire (qu'il n'obtiendra pas)
et met en place un journal.
Notre
secteur n'est pas épargné et plusieurs syndicats
SUD ou SUD-CRC se créent. L'appareil confédéral
réussira au congrès confédéral suivant
(1998) de marginaliser « Tous ensemble » qui prendra
la décision de se dissoudre au lendemain du congrès.
Elle parachèvera l'ouvrage en reconquérant la direction
de la région BASSE-NORMANDIE (un des piliers historiques
de l'opposition dans la CFDT) poussant dehors les syndicats de
gauches.
Si
les directions confédérales CGT et FO soutiennent
le mouvement, il le font contraintes et forcées par la
force du mouvement. Leur unité n'est pas au rendez-vous.
Elles se gardent bien d'appeler le secteur privé à
rejoindre le mouvement et vont à la soupe dès que
le gouvernement les y appelle.
SUD-CRC
de l'HÉRAULT
Le mouvement de l'hiver 95 a eu la particularité
de mettre au grand jour le décalage entre les
positions des appareils syndicaux et celles
des militants. Au niveau de la CFDT en particulier,
la question de la réforme de la protection sociale
(plan JUPPÉ) a cristallisé à la fois
des divergences d'ordre politique et de conception
du syndicalisme. Dans l'HÉRAULT, et à
un niveau interprofessionnel, dès décembre 1995,
l'opposition CFDT a commencé à se structurer
(«
Tous ensemble »).
Cette dynamique a permis aussi à des militants
« sociaux » de se regrouper et d'animer
un courant oppositionnel au sein du syndicat
Santé-Sociaux.
Inscrits
dans cette dynamique, nous avons constaté une
immense divergence entre nos positions et celles
des « confédéralistes ». La question
de notre sortie de la CFDT devenait de plus
en plus certaine. Un effet déclencheur s'est
produit : le syndicat CFDT Santé-Sociaux a refusé
la nomination d'un délégué syndical «
oppositionnel », choisi par la quasi unanimité
de la section. En janvier 1997, 40 militants
et adhérents prenaient collectivement la décision
de quitter la CFDT. Nous connaissions des militants
de SUD PTT et l'existence d'une fédération inscrite
dans la même dynamique. Un syndicalisme impliqué
dans des luttes sociales avait du sens pour
nous, une pratique de la démocratie active nous
a suffisamment séduit pour que nous nous lancions
dans l'aventure. La création du syndicat SUD-CRC
a été décidé en février 1997. En parallèle,
une « Union Syndicale Groupe 1O »
s'est constituée. Notre nombre d'adhérents est
en perpétuelle évolution, avec des coups d'accélérateur
à la faveur des mobilisations du secteur (RTT
principalement).
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OFFENSIVE
SYNDICALE (Numéro spécial de décembre 1999)
Bulletin de la fédération National SUD-CRC
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